Disparition d’André Guillemont (1921-2016)
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Nous avons appris avec tristesse le décès au début de ce mois d’André Guillemont. Il venait d’avoir 95 ans.
Professeur de lettres classiques, militant historique du SNES, classique et moderne d’abord puis du SNES (classique, moderne, technique), il fut secrétaire du S3 Unité et Action de Rouen au début de l’existence de l’académie.
Il entra ensuite au secrétariat national où il s’occupa des affaires personnelles dans la décennie 1970.
Il avait été fondateur de l’IRHSES et venait assister à tous les CA tant que sa santé le lui permit.
Nous l’avions interviewé en 2003 et avions rédigé sa notice biographique dans le Maitron.
Avec lui disparaît un des militants fondateurs de notre syndicalisme, discret, dévoué, très attaché à son syndicat.
GUILLEMONT André, Jean
Né le 1er février 1921 à Ercheu (Somme) ; professeur ; militant du Syndicat national de l’enseignement secondaire puis du Syndicat national des enseignements de second degré, secrétaire de la section académique de Rouen (Seine-Inférieure, Seine-Maritime, 1967-1971), secrétaire national (1969-1977).
Dernier des quatre fils de Rieul Guillemont, ingénieur des travaux publics de l’État qui avait dirigé la construction des ponts sur le canal du Nord avant la Première Guerre mondiale et avait été prisonnier civil des Allemands, et de Marie Louail, sans profession, André Guillemont commença à aller à l’école dans le petit village d’Ercheu, près de Roye dans la Somme. Il accomplit le reste de sa scolarité primaire à Pîtres (Eure) où son père contrôlait la construction de la grande écluse d’Amfreville sur la Seine, au titre des Réparations dues par l’Allemagne. Il fit toutes ses études secondaires comme interne au lycée Corneille de Rouen (Seine-Inférieure) et obtint son baccalauréat en 1939, un an après avoir perdu sa mère.
À l’âge adolescent, André Guillemont commença à s’intéresser à la politique. Lecteur des articles de Jean Prévost*, qui avait été élève au même lycée que lui, il partageait les idées de son père, militant pacifiste du Parti socialiste SFIO.
En voyage avec son père durant l’été 1939 en Pologne, pour rendre visite à son frère aîné, ingénieur à Katowice, ils furent surpris par la déclaration de guerre et durent rentrer en France en faisant un long détour par les pays scandinaves et l’Angleterre. André Guillemont put cependant faire sa rentrée en classe d’hypokhâgne du lycée Henri-IV de Paris alors transférée au lycée Malherbe de Caen. Il demeura dans cette prestigieuse khâgne jusqu’en 1942, tout en préparant une licence de lettres à la Sorbonne. Licencié ès lettres en 1943, diplômé d’études supérieures, il ne put se consacrer à la préparation de l’agrégation et, pour échapper au Service du travail obligatoire, vint se réfugier dans son village natal où son père avait pris sa retraite.
À la Libération, André Guillemont obtint une délégation rectorale au collège de Pontoise (Seine-et-Oise, Val-d’Oise). L’année suivante, il fut affecté au lycée Chanzy de Charleville (Ardennes) et, après inspection par l’Inspecteur général Cayrou, obtint une délégation ministérielle pour le lycée Corneille de Rouen en 1946-1947. Il fut titularisé en 1949 certifié de lettres classiques au collège moderne du Havre (Seine-Inférieure), qu’il avait rejoint en 1947, là où résidait France Lalemant, adjointe d’enseignement, qu’il avait épousée en juin 1947 à Sanvic (Seine-Inférieure) et avec laquelle il eut un fils. Dans ce collège moderne, il ne put, dans les premiers temps, enseigner le grec ni le latin ; cela fut possible plus tard après la transformation du collège en lycée de la Porte océane, établissement où il resta en poste jusqu’à sa retraite.
Militant dans les Équipes nationales en 1944, dont il fut le délégué départemental adjoint de l’Eure de juillet à septembre, socialiste de cœur, André Guillemont n’adhéra pourtant jamais au Parti socialiste SFIO. Il milita au Havre à la Nouvelle gauche en 1953 puis au Parti socialiste unifié (PSU) à partir de 1960. Il commença à militer au SNES (classique et moderne) qui venait d’être créé en 1949 au début des années 1950. Il avait pris sa première carte syndicale en 1950, car auparavant il n’y avait pas de section syndicale du Syndicat national des collèges modernes au collège moderne du Havre et il y créa une section du SNES en 1951. À partir de 1955, sans jamais avoir été adhérent de la FEN-CGT, il milita pour la liste B comme membre de la commission administrative de la section académique de Caen. Il avait en effet rencontré Edouard Patard*, nommé professeur certifié stagiaire dans son collège, qui l’avait dissuadé de rejoindre l’École émancipée dont ce dernier venait, pour rallier le courant B. Les deux militants n’allaient plus se perdre de vue.
En 1958, André Guillemont apparut pour la première fois sur la liste B aux élections à la CA nationale du SNES. En 1960, alors que montait un fort mécontentement dans le corps enseignant au sujet des conditions de travail, des carrières et des projets de réforme, il fut l’organisateur d’une grève lors de la venue du ministre de l’Education nationale, Louis Joxe, au Havre pour inaugurer son lycée. Quelque temps après, en 1962, il devint secrétaire adjoint de la nouvelle section académique (S3) de Rouen dont le secrétaire était Edouard Chauvin, un professeur de mathématiques spéciales du lycée Corneille, militant de la liste A, très hostile au projet de fusion avec le SNET. Il demeura secrétaire adjoint auprès de Davoine, un autre militant autonome, et devint secrétaire du S3 du nouveau SNES (classique, moderne, technique) en 1967 avec Michel Loie, un militant du SNET du courant « Union pour une action syndicale efficace ». Après avoir été désigné membre suppléant de la première CA nationale en 1966, il fut élu titulaire en 1967, quand la majorité du syndicat bascula en faveur du courant Unité et Action. Il était en même temps, de 1960 à 1968, vice-président de la Fédération havraise des œuvres laïques.
Au cours des événements de 1968, André Guillemont se dépensa beaucoup pour animer des réunions dans les établissements et maintenir le cap syndical défini par la majorité. En 1969, avec tous ses camarades de parti et de tendance ayant des responsabilités au niveau académique et national, il dénonça les pressions exercées par la direction du PSU (Robert Chapuis*) pour qu’ils abandonnent les rangs U et A afin de venir renforcer le nouveau courant Rénovation syndicale. Il démissionna alors du PSU et n’eut plus ensuite d’adhésion partisane. Cette même année, il fut appelé à la direction nationale par Étienne Camy-Peyret* pour piloter les affaires personnelles, responsabilité qu’il occupa jusqu’en 1977. Commissaire paritaire national des certifiés de 1969 à 1977, il eut la lourde charge, non seulement de traiter nombre de dossiers de certifiés en collaboration avec Patard mais aussi de s’occuper des affaires des maîtres auxiliaires et des adjoints d’enseignement en collaboration avec les secrétaires de catégorie des adjoints d’enseignement-maîtres auxiliaires et les commissaires paritaires des AE et d’être rapporteur sur les questions de la titularisation aux congrès des années 1972-1973. Cet investissement très prenant le conduisit en 1971 à laisser la responsabilité principale du S3 à Annette Mazauric*, qui avait été son adjointe. Il demeura cependant secrétaire adjoint de la section académique qui organisa le congrès national du SNES à Rouen en 1973.
En 1977, à la suite d’une congestion cérébrale qui le laissa partiellement paralysé durant plusieurs mois et déprimé, André Guillemont dut interrompre toutes ses activités syndicales. Il reprit un demi-service d’enseignement jusqu’à sa retraite prise en juin 1981.
De 1987 à 2001, André Guillemont fut secrétaire académique des retraités du SNES de Rouen et membre du bureau national. Il était membre fondateur de l’IRHSES et membre de son conseil d’administration.
SOURCES : Arch. IRHSES. – Interview par A. Dalançon et A. Drubay en 2003.
Alain Dalançon, Pierre Pétremann